25/06/12 - Etude d'oeuvre
Etude d’œuvre – Le déjeuner sur l’herbe, Édouard Manet
L’œuvre de Manet que nous allons analyser a été faite à la
peinture à huile. Revenons sur cette technique. On retrouve des traces de
celle-ci déjà au Moyen-Âge où ils mettaient une dernière couche huileuse pour
protéger leur peinture. Par la suite, au XVe siècle, les frères Van
Eyck ont contribué au développement et au perfectionnement de cette technique.
C’est à cette période que les peintres accrochent les toiles sur des châssis.
Tous les supports qui servent à accueillir la peinture à l’huile doivent
d’abord être enduits. Jusqu’au XIXe siècle, les artistes prenaient
des pigments et les mélangeaient à l’huile et les utilisaient immédiatement.
Puis, apparaissent les couleurs déjà préparées et prêtes à l’emploi.
Édouard Manet, né à Paris le 23 janvier 1832, est un peintre
français. Il est issu d’une famille aisée, dans la famille de son père, ils
sont magistrats et du côté de sa mère, ils sont diplomates. Après avoir refusé
de suivre des études de droit et échoué au concours de l’école Navale, il entre
en 1850 à l’atelier
de Thomas Couture. Les œuvres
du peintre ont inspiré le mouvement impressionniste, mais qui il s’attacha toujours à préserver son
indépendance. L’influence considérable qu’il exerça sur la peinture française
et, plus généralement, sur l’art moderne s’explique à la fois par le choix de
sujets faciles, tirés de la vie quotidienne, par l’utilisation de couleurs
pures et par une technique rapide et libre. Les premières peintures de Manet représentent essentiellement des scènes
de genre, souvent d’inspiration espagnole, ainsi que des portraits. Sa
technique picturale, franche et directe, laisse apparaître de larges touches. Il
peint aussi beaucoup de natures mortes car il arrive mieux à les écouler que
les portraits et cela lui permet de mieux vivre financièrement. Il a peint
plus de quatre cents toiles, des pastels, esquisses et aquarelles. Ses plus
grandes œuvres sont visibles dans beaucoup de musées, en particulier dans celui
d’Orsay à Paris. Le peintre meurt le 30 avril 1883 de la gangrène.
Passons maintenant au tableau intitulé : le «
Déjeuner sur l’herbe ». Avant cela, le tableau a porté deux autres
noms : « Le bain », puis « La partie carrée ». Ella a
été peinte entre 1862 et 1863. Elle mesure 208 cm de haut et 264.6 cm de large.
La taille a été délibérément choisie si grande car elle est généralement
utilisée pour des tableaux historiques. Le tableau représente une scène au bord
de l’eau. Deux hommes habillés sont assis avec une femme nue. Une autre femme,
habillée d’une chemise, se baigne en arrière-plan. La femme nue regarde le
spectateur avec insistance. Un autre homme regarde, avec détachement, également en notre direction. Au tout premier
plan, le panier de pique-nique est renversé à côté des vêtements de la femme.
Les contrastes de couleurs sont grands, entre l’arrière et l’avant, entre la
femme nue et les hommes habillés. Il y a de grandes surfaces claires opposées à
de grandes surfaces foncées. Les personnages ne semblent pas être intégrés au
décor, la perspective est ignorée et la profondeur est inexistante. Les
éléments semblent être posés les uns à côté des autres plus par envie du
peintre que par une représentation réelle d’une scène qui aurait existé.
Manet s’est inspiré de deux œuvres historiques. La première,
« Le concert champêtre », vraisemblablement commencé par Giorgione et
terminé par son élève Titien vers 1509, il y a aussi deux femmes nues et deux
hommes habillés. Les muses appartiennent à un autre monde, elles ne s’occupent
ni des musiciens, ni des spectateurs ; les hommes ne sont pas habillés en
costume moderne.
Le concert champêtre
La deuxième œuvre serait une gravure produite par Marcantonio Raimondi à partir d’un dessin de Raphaël intitulée le « Jugement de Pâris », des années 1500 où l’on retrouve des personnages quasi dans la même posture.
Le jugement de Pâris
La peinture va choquer à cette époque, en particulier le réalisme avec lequel Manet peint la situation : la nudité de la femme est scandaleuse car ses compagnons sont habillés avec des habits courants. La nudité n’est pas justifiée par un thème mythologique. Cette peinture sera exposée au Salon des Refusés. Ce qui choque également à l’époque est le fait que les coups de pinceaux sont visibles, Manet rompt avec la tradition et change la manière de peindre. Peu de gens à l’époque l’ont défendu. Celui qui lui fut fidèle était Émile Zola. Il a d’ailleurs écrit un texte pour défendre son compatriote : « (…) La foule s'est bien gardée d'ailleurs de juger Le Déjeuner sur l'herbe comme doit être jugée une véritable œuvre d'art ; elle y a vu seulement des gens qui mangeaient sur l'herbe, au sortir du bain, et elle a cru que l'artiste avait mis une intention obscène et tapageuse dans la disposition du sujet, lorsque l'artiste avait simplement cherché à obtenir des oppositions vives et des masses franches. Les peintres, surtout Édouard Manet, qui est un peintre analyste, n'ont pas cette préoccupation du sujet qui tourmente la foule avant tout ; le sujet pour eux est un prétexte à peindre tandis que pour la foule le sujet seul existe. Ainsi, assurément, la femme nue du Déjeuner sur l’herbe n’est là que pour fournir à l'artiste l'occasion de peindre un peu de chair. Ce qu'il faut voir dans le tableau, ce n’est pas un déjeuner sur l'herbe, c'est le paysage entier, avec ses vigueurs et ses finesses, avec ses premiers plans si larges, si solides, et ses fonds d'une délicatesse si légère ; c'est cette chair ferme modelée à grands pans de lumière, ces étoffes souples et fortes, et surtout cette délicieuse silhouette de femme en chemise qui fait dans le fond, une adorable tache blanche au milieu des feuilles vertes, c’est enfin cet ensemble vaste, plein d'air, ce coin de la nature rendu avec une simplicité si juste, toute cette page admirable dans laquelle un artiste a mis tous les éléments particuliers et rares qui étaient en lui. »
En conclusion, « Le déjeuner sur l’herbe »est une magnifique œuvre qui suscite la controverse. Le propre d’un artiste est de déranger, provoquer et créer le débat, chose que Manet a su faire avec brio. Aujourd’hui considéré comme un génie dans son milieu, autrefois, il créait le scandale en peignant cette œuvre en désaccord avec ses compatriotes.
Note: 6/6
Commentaire: C'est très bien et très détaillé.